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HERVE GUYADER - Page 19

  • Faut-il supprimer la nature mixte des accords de libre-échange ?

    Publié aux Echos

     

    Le récent véto wallon au CETA a fait vaciller, l’espace de quelques jours, la politique commerciale de l’Union européenne, ce qui appelle à une réforme de celle-ci.

    Cela n'aura échappé à aucun observateur du droit du commerce international, la nature des accords de libre-échange en Europe pose la question de sa crédibilité

    Compétence exclusive ou partagée ?

    La politique commerciale européenne est une compétence exclusive de l'Union pour autant que l'accord négocié se cantonne à éviter les champs de compétence partagée fixée par l'article 4 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union européenne, signé à Lisbonne. Ces champs partagés comprennent le marché intérieur, la politique sociale, la cohésion économique, sociale et territoriale, l'agriculture et la pêche, l'environnement, la protection des consommateurs, les transports, etc.

    On l'aura compris, à moins de se cantonner au seul sujet des droits de douane tel qu'était la vision du libre-échange du 20e siècle, aucun accord tel que sont envisagés le CETA, le TTIP, le futur accord avec le Japon... ne peut échapper à cette qualification.

    La compétence partagée implique qu'en sus de l'Union européenne et de la ratification du Parlement européen le traité soit ratifié par chaque parlement national. Ceci donna l'occasion aux Néerlandais de s'opposer au traité conclu avec l'Ukraine et aux Wallons de faire de même, l'espace d'une neuvaine, contre le traité conclu avec le Canada. Comment éviter qu'une telle situation se reproduise ?

    Supprimer le vote des parlements nationaux

    L'Europe est devant une double crise de crédibilité sur la scène internationale et de légitimité mise à mal par l'ensemble des dirigeants politiques qui pensent se grandir en l'abaissant. Il est possible d'appeler à une refondation politique, démocratique de l'Europe tendant vers une plus grande implication des parlements nationaux.

    En sens inverse, il est possible de plaider pour une réforme tendant à la suppression de la nature mixte pour confier toute compétence à la seule Europe et ainsi supprimer le vote des parlements nationaux. Imaginez les États-Unis obligés de solliciter l'avis des 50 États fédérés.

    Cette idée, audacieuse, est frontalement contraire aux discours populistes. Elle s'oppose également aux plus récentes propositions de Matthias Fekl, secrétaire d'État au commerce extérieur, qui réclame davantage de transparence et une implication des parlements nationaux et des États. Sa concrétisation soulèverait de multiples problématiques.

    De profondes difficultés de mise en application

    La première, déjà cruciale, est relative à la souveraineté qui est brancardée comme un étendard par tout ce que la France compte d'extrémistes de gauche comme de droite. La faillite de l'Europe serait due à son absence de démocratie, sa distanciation par rapport aux préoccupations des citoyens et rend inéluctable ici un retour au peuple, là un retour à la nation France. Il ne faudrait cependant pas oublier que l'Europe s'est construite sur la volonté commune des États !

    La seconde, juridique, revient à se demander comment opérer si l'on décidait de revenir sur cette qualification de traité de nature mixte. Deux observations en découlent.

    La première consiste à évoquer une réforme du Traité de Lisbonne dans un sens peu favorable à l'air du temps, car supprimant le vote des parlements nationaux au profit du seul parlement européen. L'unanimité requise des États membres suffit à considérer cette hypothèse comme irréaliste.

    La seconde, toujours juridique, revient à appeler la Cour de Justice de l'Union européenne à délivrer une interprétation audacieuse de la nature (mixte) des traités commerciaux en les intégrant dans la compétence exclusive de l'Union. La Cour doit rendre une décision très attendue l'an prochain relativement à l'accord de libre-échange signé entre l'Union et Singapour qui pourrait consacrer une telle interprétation.

    Reste qu'en ces temps où l'Europe est accusée de tout, il serait sage de cantonner la réforme de la nature mixte aux seuls accords commerciaux et non à l'ensemble des problématiques européennes comme la sécurité ou la défense qui sont des domaines innervés d'une opportune souveraineté.


    En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-162390-faut-il-supprimer-la-nature-mixte-des-accords-de-libre-echange-2041614.php?TvufgSis6hzwzG1B.99
  • Ceta : les deux (bonnes) surprises de l'accord

    Publié aux Echos

     

    LE CERCLE/HUMEUR - Au-delà du libre-échange, le Ceta s’intéresse à la mobilité des salariés des entreprises de service et des étudiants.

    L’accord de libre-échange entre le Canada et l'UE, aux termes d’un nouveau psychodrame européen, a enfin pu être signé le 30 octobre dernier, nos amis wallons étant revenus à la raison. Jamais pourtant le texte n’a été autant décrié par ses opposants. Au-delà de son contenu, c’est sa longueur, 1.598 pages, qui se trouve maintenant fustigée. Loin d’être illisible, l’accord est d’accès très aisé d’autant que son corps ne court que sur 230 pages, le reste étant composé d’annexes clairement découpées.

    Lire aussi :
    > Le Ceta, nouveau révélateur des fragilités européennes

    Il est question de développement durable, d’environnement, de droits sociaux dans des perspectives bien plus ambitieuses que ce qui a pu être vociféré ici ou là. Beaucoup crient contre le dispositif de règlement des contentieux sans pour autant l’avoir pratiqué.

    Mobilité et reconnaissance des diplômes

    Mais il est deux mécanismes qui sont restés sous silence alors pourtant qu’ils offrent des perspectives plus que réjouissantes. Il s’agit de la mobilité des salariés travaillant dans des entreprises de services (chapitre 10) et de la mutuelle reconnaissance des diplômes (chapitre 11).

    Ces deux éléments sont, à eux seuls, susceptibles de provoquer l’adhésion du plus grand nombre, à tout le moins de ceux qui, quel que soit leur âge, ambitionnent d’aller travailler au Canada. Repensant à l’Europe, la gestion de la mobilité professionnelle préfigura la libre circulation des personnes. Quant à la mutuelle reconnaissance des diplômes, elle s’accompagna du programme Erasmus qui fait le bonheur de dizaines de milliers d’étudiants chaque année allant étudier dans un pays européen. 

    Lire aussi :
    > Ceta : de quoi parle-t-on exactement ?

    Ce qui fit le succès européen sera désormais bientôt applicable dans les relations avec le Canada. Certes, chapitre 10 et 11 du Ceta sont pour l’heure que des accords-cadres qu’il faudra déployer et préciser. Mais ce cadre permet de regarder ce traité de manière bien plus ambitieuse et souriante qu’un simple accord de libre-échange tant il comporte ce précieux volet civilisationnel.

    Un possible Erasmus transatlantique ?

    Les échanges universitaires permettent de proposer à notre jeunesse un avenir inscrit pleinement dans le désir de mobilité qui l’anime. Le nomadisme caractérise désormais de plus en plus notre quotidien. Le fait que le Ceta le prenne en compte aussi clairement permet de répondre aux critiques de ceux qui n’y voient qu’un instrument fossoyeur de nos préférences collectives.

    Le silence gardé sur ces dispositions suffit à qualifier l’attitude des opposants dont l’obstruction n’est nourrie que d’idéologies stériles autant que sectaires. D’autant que le Canada est une destination très prisée de nos étudiants, à la fois pour sa dimension culturelle plurielle que comme porte d’accès à la culture américaine.

    De plus, si le Ceta se révèle être l’antichambre du TTIP, rien n’interdit de rêver à un «Erasmus transatlantique» permettant une parfaite mobilité de la jeunesse de part et d’autre de l’océan


    En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-162177-le-ceta-au-service-de-la-mobilite-2040031.php?J55kD22jQjhWgOxd.99#xtor=CS1-33
  • M. Paul Magnette, votre veto sur le Ceta est injustifiable

    Publié aux ECHOS

     

    LE CERCLE/HUMEUR - Paul Magnette, le ministre-président de Wallonie a fait capoter l'accord de libre-échange entre l'Europe et le Canada. Son obstination est incompréhensible.

    C’est vendredi 21 octobre que le ministre-président de Wallonie, Paul Magnette, a opposé son veto au traité commercial de libre-échange entre l'Europe et le Canada (Ceta). Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau , avait alors reporté son déplacement prévu ce jeudi 27 octobre à Bruxelles pour la signature du traité. Le sommet a même été annulé.  Aux dernières déclarations wallonnes, c’est le volet agricole ainsi que les tribunaux arbitraux qui continuent de poser problème.

    Il aura fallu attendre le Ceta pour découvrir l’intérêt primordial que la Wallonie, région francophone belge, réserve à l’agriculture, elle qui semblait bien davantage orientée, notamment, sur l’industrie chimique et pharmaceutique ainsi que sur les services.

    Des efforts pour la Wallonie

    Il est d'autant plus difficile de comprendre l'attitude de Paul Magnette dans la mesure où les différents partenaires ont essayé de satisfaire certaines exigences wallones.  Ainsi, une clause de sauvegarde générale permettant à la Belgique ou une entité fédérée de se retirer du Ceta : cette demande a été pleinement acceptée. Le mécanisme de règlement des différends doit évoluer vers une cour internationale publique. Cette demande est pleinement intégrée et des engagements clairs sont pris à cet égard. L’accès aux PME sera facilité.

    Dans le domaine agricole, des mécanismes de sauvegarde particuliers sont prévus pour les consommateurs et les agriculteurs permettant l’activation de mesures de protection et soutien, y compris lorsqu’un déséquilibre de marché est identifié pour un seul produit. Les services aux personnes au sens large (y compris associatif) et les mécanismes d’assurance sociale sont pleinement protégés et exclus du champ d’application du Ceta.

    Une obstruction incompréhensible

    Les acquis wallons sont notables. Les dernières déclarations de Paul Magnette révèlent qu’il juge peu démocratique le processus, semblant regretter l’adresse sèche du texte assortie de la nécessité de se prononcer. Le calendrier était connu de tous, le texte aisément consultable depuis fort longtemps. La lecture des 1.598 pages est assez rapide pour peu, naturellement, que l’on soit coutumier de ce genre de textes.

    Reste donc un effet d’ego mal placé, d’orgueil chagriné de se voir adresser des ultimatums par la totalité des autres membres de l’Union européenne ravis de sceller une entente avec nos amis canadiens. À moins qu’il ne soit question d’une opposition de principe au libre-échange.

    La Wallonie, trop peu ouverte

    Il demeure qu’après le Royaume-Uni, c’est désormais la Belgique qui fait vaciller l’Union européenne. Si les Britanniques nous ont habitués à tout et manifestaient une culture européenne bien tiède, on en attendait davantage de la Belgique qui n’accueille rien moins que la Commission européenne.

    Il est du reste amusant d’apprendre sur le site Connaître la Wallonie, région moins favorisée économiquement que sa voisine flamande, que le retour à la croissance en 2010 a été rendu possible grâce aux échanges internationaux.

    La RTBF, média belge, déplorait il y a quelques mois que « la Wallonie peine à s'ouvrir au monde, et plus particulièrement aux pays non européens, qui ne représentent que 15 % des exportations ». Cette situation risque de ne pas s’améliorer avant longtemps


    En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-161987-monsieur-magnette-votre-veto-sur-le-ceta-est-injustifiable-2038365.php?RArYWIx3obHw5vuc.99#xtor=CS1-33